J'apprends à me réconforter
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Lundi 1 juillet 2019
Aujourd’hui Benjamin est parti pour le Texas et je suis triste. Troisièmes voyages en deux ans pour passer du temps avec son amoureuse. L’intensité de mes émotions est moins forte que l’année passée, mais la distance physique et émotionnelle m’affecte aussi cette année.
Une partie de moi est très contente pour lui, il est heureux et c’est mon plus grand souhait. Une autre partie est triste, sa présence me manque. On a une belle relation et je n’ai pas hâte qu’il quitte le nid familial.
Le soir de son départ, je me suis retrouvée seule avec mes émotions. Assis dans la pénombre, j’ai senti que j'avais un choix à faire. Me divertir pour oublier mes émotions pendant quelques minutes ou faire l’expérience de me réconforter.
Évolution de mon processus de réconfort
Jusqu’à maintenant j’ai souvent fait l’expérience de moments où émotionnellement je ne me sens pas bien et où je choisis de m’offrir de la douceur. Ces journées où rien ne va plus étaient une source de chaos, ça pouvait durer plusieurs heures et parfois quelques jours. J’avais du mal à me remettre de ce débalancement, cette sortie hors de l’état d’harmonie et de paix dont j'avais besoin pour être dans la bienveillance.
Éventuellement j’ai compris qu’il ne fallait pas attendre que les autres me donnent le droit de me choisir, de m’aimer. Je devais être celle qui s’offre un moment de repos pendant une journée intense. Je devais être celle qui déplace un rendez-vous pour ne pas me sentir surchargé. J'avais le droit.
Un jour, pendant un moment difficile, je me suis souvenue que je désirais être plus douce avec moi dans ce genre de situation, ce que j’ai fait. J’ai décidé de repousser à plus tard ce qui était prévu cette journée-là pour prendre du temps pour moi. La libération que j’ai ressentie a été incroyable! Cette douceur que je m’offrais me libérait de la pression pesant sur mes épaules. Elle me libérait aussi d’une partie des émotions difficiles que je vivais dans le moment présent.
Comment se réconforter?
La prochaine étape était d'expérimenter le réconfort. Je voulais, comme je le fais pour mes enfants, vivre un moment qui me ferait sentir réconforté et aimé. Même si j'étais maintenant capable de prendre soin de moi en changeant la direction de ma journée quand je n’allais pas bien, je n'entrais pas dans cette zone de réconfort.
La journée où Benjamin est parti a été l’occasion de me créer un rituel de réconfort.
Je me suis d'abord demandé ce que je voulais ressentir. Je désirais vivre la sensation d’être aimé. Cette sensation que j'éprouve lorsque je fais un colleux à Léo, mon coeur se réchauffe, mon énergie s’adoucit. Je me suis rarement senti réconforté dans ma vie et c'est un effort de traduire le réconfort que j’offre à mes enfants à un réconfort que je m’offre.
Quand mes enfants ont de la peine, je les colle, je les flatte et je leur offre un moment d’accueil sans jugement avec des mots qui résonnent l’amour que j’ai pour eux. C’est la partie plus difficile à traduire. Je n’ai pas le gout de me faire un colleux comme parfois j’ai fait dans des cours new age. Ça ne me fait pas sentir réconforté ou aimé.
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Puis j’ai pensé aux doudous qu’avaient les enfants quand ils étaient jeunes. Le réconfort qu’ils tiraient de ces objets était évident. J’ai réalisé que mon oreiller et mon lit sont pour moi des objets de réconfort.
J’ai été chercher mon oreiller et l'ai déposé sur le divan dans le salon. J’ai ajouté de la douceur avec quelques chandelles et une douce doudou. J’ai choisi de la musique qui reflètait mes émotions du moment, l’album Wallflower de Diana Krall.
Je me suis couché sur le divan bien calé dans mon oreiller et quelques instants après j’ai entendu les pas de Léo qui montait les marches. Il a décidé de se joindre à moi. Il s'est installé dans le fauteuil en velours orange. Il s'est mis confo et ensemble on a passé environ 1h30 à écouter la musique et à vivre nos émotions.
Au début en silence.
Mon regard se pose sur la mine triste de Léo et je lui demande à quoi il pense, à son frère. Je lui demande s'il est triste, oui. Je sens son émotion s'intensifier et ses yeux se voiler. Je le flatte et je pousse doucement le fauteuil pour créer un mouvement de bercement, de réconfort.
Je sens mes émotions se mouvoir avec la musique. Je me sens transporter par la douce mélodie et par la voix rauque de l'interprète. Ma main a envie de bouger pendant California Dreamin et je la laisse s'exprimer.
J'ai des hoquets de soupir après quelques chansons qui me touchent particulièrement et je bâille, deux signes m’indiquant que mes émotions se libèrent. Ce qui est pour moi, ma compréhension de laisser passer les émotions à travers moi au lieu de les refouler en me divertissant.
Je fais une comparaison à Léo entre les émotions et la fumée. La fumée dans l'air se dissipe comme les émotions qu'on laisse libres de s'exprimer en soi. Si l'on emprisonne la fumée dans un verre hermétique, elle ne se dissipe pas, comme les émotions qu'on refoule.
Après plus qu'une heure, je me sens mieux et Léo aussi. Je sens la possibilité de la joie. J'ai versé quelques larmes et on commence à parler de divers sujet tranquillement. On émerge.
Lendemain
J’ai fait un rêve étrange où Benjamin ne me suivait pas alors que je guidais un groupe de personne en dehors d’un édifice en train de s'effondrer. Le rêve exprime probablement la séparation que je ressens dans notre relation et concrétise ma peur de le perdre.
Aujourd'hui, je me sens moins triste et plus en paix, pour l’instant. Ce moment qu’on a vécu moi et Léo hier soir, semble nous avoir rapprochés. Vivre des émotions ensemble, j’imagine, peut avoir cet effet. Quand il s’est levé ce matin, quelques instants plus tard que moi, il avait un grand sourire et il est venu me coller. Il me flattait le dos doucement et je sentais son amour pour moi.
Les émotions c'est comme des vagues. Je suis curieuse de voir comment hautes vont être mes vagues aujourd’hui après ce rituel de réconfort.
En préparant le dîner, des tartines de champignons, une autre vague de tristesse s'est manifestée. J'avoue que pendant que je faisais la cuisine, c'était un peu dérangeant. Je ne savais plus où donner de la tête. J'étais confuse.
Quelques minutes après avoir terminé le dîner, la vague de tristesse est encore en moi. Quand je fais le silence et que je porte mon attention en moi, je la ressens, moins pire, mais présente. Je n'ai pas envie de me coucher sur le divan comme hier soir. J'ai envie de jouer et de me divertir.
Cet après-midi là, j’ai fait une méditation et j’ai retrouvé ma paix intérieure. Il y a toujours un fond de tristesse, mais je la qualifierais plus d’ennui.
Cette journée restera à jamais marquée comme étant la première fois où je me suis créé un rituel de réconfort. Je n’ai pas mangé mes émotions, je n’ai pas refoulé mes émotions, je les ai vécus en les accueillant comme elles sont sans les juger, avec amour.
Choisir de me réconforter et prendre le temps de laisser les émotions en moi « être » a vraiment eu l’effet recherché. Je me suis senti réconforté et aimé, importante.
Julie xo
Déjà dans mon enfance je savais intuitivement que la violence faite aux enfants et pas seulement celle qui laisse des traces sur le corps avait un impact négatif, et ce tout au long de la vie. Cette violence, acceptable pour une grande partie de la population, que j’ai vécue dans mon enfance a fait en sorte que j’avais une très faible estime de moi-même, que j’avais tendance à broyer des idées noires et que j’avais des croyances sur moi-même, sur mes capacités, sur ma valeur et tout, tout, tout, très négatives. J’étais loin de me douter qu’un jour la science allait prouver ce qu’intuitivement j’avais compris depuis longtemps.