Jeunes adultes unschoolers - Épisode 2

Ligne du temps de Benjamin et Léo en 14 points.

Mes impressions et mes commentaires sur cet épisode juste après la vidéo.

Comment as-tu fais pour avoir ton secondaire?

Benjamin

Correction à la vidéo: Benjamin a f (1 an et demi) à l’Accès collégial.

Les cours de l’Accès collégial sont des cours magistraux comme au secondaire régulier. La différence est que chaque cours dure une session, quelques mois au lieu d’une année. Les cours sont intensifs et les élèves peuvent suivre jusqu’à 4 cours par session.

Benjamin a obtenu les crédits nécessaires à l’obtention du D.E.S. en 1 an et demi parce que lorsqu’il a passé les évaluations en anglais, il a obtenu les crédits de l’anglais fort sans avoir à faire les cours. Je me souviens de ma réaction quand il m’a dit ne pas avoir de cours d’anglais à faire. C’est une chose de savoir que nos enfants apprennent réellement les outils comme les langues, les mathématiques et les sciences à travers leurs intérêts et surtout de façon libre, mais c’est une autre chose que le milieu scolaire reconnaisse leur niveau acquis sans l’utilisation de manuels scolaires et de fréquentation scolaire.

Benjamin a l’impression que c’était plus facile à l’Accès collégial, mais je ne suis pas certaine que sa perception soit exacte. C’est pour ça que dans la vidéo je lui pose d’autres questions, j’essaie de comprendre d’où lui vient cette perception.

Quelques temps après avoir tourné cette vidéo, j’ai demandé à Benjamin si sa perception que l’Accès collégial est plus facile est basée sur ce que lui a rapporté des jeunes de l’Accès collégial et il m’a répondu que non. Je pense que la perception de Benjamin est basée sur le fait que les jeunes qui sont à l’Accès collégial sont la plupart des décrocheurs. Benjamin doit penser que parce qu’ils réussissent à l’Accès collégial c’est la confirmation que c’est plus facile qu’au secondaire régulier où ils ont échoué.

Je crois aussi que sa perception est influencée parce qu’on dépeint l’acquisition des apprentissages dans le milieu scolaire comme étant difficile. C’est à l’école qu’on apprend qu’il faut faire des efforts pour réussir. Benjamin n’a pas vraiment eu de difficulté à l’Accés Collégial et il doit en tirer la conclusion que l’Accès collégial est facile. J’ai l’impression qu’il doit se dire « Comment quelque chose peut être facile pour moi alors que je n’ai pas utilisé de manuels scolaires. »

L’Accès collégial est un programme au secteur des adultes. Il faut 52 crédits (si je ne me souviens bien) pour obtenir un D.E.S. alors qu’il en faut plus pour obtenir un DES au secteur jeune (secondaire régulier). 

Je ne crois pas que c’est plus facile, parce que les jeunes font ce programme principalement en préparation pour le collégial. C’est important qu’ils soient prêts comme le sont leurs collègues au secondaire régulier.

Léo

J’ai rencontré à plusieurs reprises les professeurs de Benjamin et Léo à l’Accès collégial. Très souvent on m’a dit combien c’était l’fun de les avoir dans leurs classes parce qu’ils étaient attentifs, intéressé et aidait les autres élèves sans les juger. En plus des bonnes notes ;)

Je pense que parce qu’ils ne sont pas tannés de l’école comme moi je l’étais à leur âge, ils sont des élèves plus attentifs que la moyenne. Je me souviens qu’un jour j’ai pris conscience que Benjamin et Léo posaient beaucoup de questions aux professeurs pendant les cours. Je suis certaine que les professeurs appréciaient, mais ma pensée a été ailleurs. Avec la fréquentation du milieu scolaire, en plus de s’habituer à l’ennui, il y a souvent cette conformité à certains comportements qui prennent tout leur sens dans le milieu scolaire, mais pas ailleurs. Comme des lois non écrites, il y a celle de ne pas poser de questions. Je ne posais pas de questions parce que c’était dangereux d’être ridiculisé par les autres élèves et parfois même par les professeurs. Mes garçons n’ont pas cette peur, car ils n’ont pas fréquenté le milieu scolaire.

Je crois aussi que c’est parce que je les ai toujours traités avec respect qu’ils respectent les professeurs et les professeurs ne sont pas habitués à ces comportements.

Benjamin et Léo, les deux, m’ont fait des remarques quand ils ont commencé l’école sur les comportements des autres élèves. On ne s’en rend pas compte, mais il y a beaucoup de comportements qui sont particuliers au milieu scolaire. Ils étaient entre autres étonnés de voir les élèves désintéressés et se coucher la tête sur leur pupitre. Je me souviens que je leur ai expliqué quelques trucs comme de lever la main pour poser une question ou pour demander d’aller aux toilettes. Même si j’ai fait ça toute ma scolarité, Benjamin et Léo trouvaient bizarre de lever la main pour demander la permission d’aller aux toilettes. Ce n’est pas juste parce qu’ils n’avaient jamais eu besoin de le faire auparavant, je crois que c’est surtout parce que de demander la permission pour un besoin aussi basique est un comportement de soumission devant l’autorité. Ce qu’ils n’avaient jamais vécu auparavant parce que c’était une priorité pour moi de ne pas avoir ce genre de relation qui ne favorise pas une bonne estime de soi.

Léo parle de combien ça été rapide pour lui d’être au niveau, entre autres, en mathématiques. Léo a eu la chance de faire quelques cahiers de mathématiques que le professeur de Benjamin lui avait remis avant d’entrer à l’Accés Collégial. Je me souviens quand j’ai réalisé, un peu frustré je dois dire, que pour être prêt pour le secondaire 4 prenant aussi peu de temps. J’ai fait du français et des mathématiques à l’école pendant une dizaine d’années avant de commencer le secondaire 4!!! Benjamin n’a jamais ouvert un manuel scolaire et Léo très peu. Pourtant en quelques semaines ils y sont arrivés. Pourquoi on passe autant de temps à l’école si on peut être prêt pour le secondaire 4 en quelques mois? Il faut bien entendu prendre en compte que ce n’est pas parce que Benjamin et Léo n’ont pas fait de manuels scolaires qu’ils n’ont acquis des connaissances et des habiletés qui sont au programme d’éducation.

Après son évaluation par le professeur de français, Léo a rencontré une tutrice qui venait à la maison une fois par semaine. Après quelques mois, il a commencé le français de secondaire 4.

Je suis contente que les garçons soient entrés au secondaire dans un milieu qui a favorisé une intégration plus humaine que d’autre organisation scolaire. Je crois que parce que le programme Accès collégial est dans un établissement plus petit que les écoles secondaires régulières, parce que les professeurs sont très impliqués et apprennent à connaitre les élèves, ce programme a favorisé une intégration moins stressante.

J’ai écrit sur ce sujet: Ne pas montrer aux enfants à faire des efforts


Comment s'est passé la transition entre la vie à la maison et la vie à l'école?

Benjamin

Je me souviens de combien j’étais étonné de voir Benjamin qui se levait chaque matin pour aller à l’école alors que personne l’obligeait à y aller. Il n’avait pas de pression de ma part, mais beaucoup de soutien. Encore aujourd’hui, je vois à quel point lui, un peu plus que Léo, a une nette préférence pour les apprentissages autonomes. Et malgré cela, il se lève chaque jour pour aller à l’école et faire ses travaux.

Ce qui fait toute la différence est que c’est son choix et qu’il a un objectif en tête. Je n’ai jamais choisi d’aller à l’école, on a fait ce choix pour moi. Je suis contente que mes garçons aient eu la liberté de choisir d’aller à l’école. Ils ont fait ce chois dans une période de leur vie où ils sont plus conscience des implications de leur choix. Ils ont la maturité nécessaire pour prendre une décision de cette ampleur. Ce que je n’avais pas à 5 ans.

Léo

Je trouve ça ironique que Léo ait tout de suite pris conscience que c’est à l’école qu’on apprend à se mettre de la pression. Parce que moi ça m’a pris du temps avant de mettre le doigt dessus. Je ressentais toute cette pression de toujours devoir faire mieux et je ne savais pas d’où elle venait. Encore aujourd’hui, je dois m’arrêter pour prendre conscience dans le moment où la pression se fait sentir pour la faire baisser et  pour en chercher la source.

« Je sentais vraiment la pression de l’école. Tu finis par tellement pousser quelqu’un, qu’il finit par faire quelque chose qu’il ne veut pas faire en premier lieu. L’école, ça reste que c’est beaucoup moins l’fun que l’école-maison. »
— Léo

Est-ce que tu as trouvé ça difficile de t'ajuster? Quels sont les ajustements que tu as dû faire (s'il y en a)?

Léo

J’ai été plus précise dans la question que j’ai posée à Léo parce que je savais qu’il a posé des actions spécifiques dans sa recherche d’organisation lui permettant de s’ajuster au milieu scolaire.

Léo utilisait Todoist avant d’aller à l’école.

Léo est une personne qui aime quand les choses sont rangées et sans avoir à lui demandé, il fait son lit tous les matins (pas moi!) et le ménage de sa chambre régulièrement. Je n’ai jamais vu de vêtements par terre dans sa chambre ou trainé sur son lit. Il a besoin d’un environnement désencombré pour se sentir bien et se concentrer sur ses travaux. Je le comprends, moi aussi je vois une différence dans mon humeur quand mon environnement est bordélique.

Benjamin

Ça m’a fait bien rire d’entendre la réponse de Benjamin. Il dit ne pas nécessairement aller vers les autres, mais qu’il n’a pas de problèmes quand les autres viennent à lui. Benjamin a toujours eu une personnalité introvertie parsemée d’un besoin de connexion authentique. Il n’est pas vraiment gêné, mais il n’a pas besoin d’avoir plusieurs amis. Il prend les devants quand il en sent le besoin, mais son besoin est très modéré. Au contraire de son frère qui est plutôt extraverti et qui apprécie de passer du temps avec ses amis.

Je ne sais pas si j’ai eu une influence positive sur leur intégration au milieu scolaire, mais j’ai toujours vu leur personnalité authentique comme un avantage. Peut-être que de l’extérieur certaines personnes peuvent trouver Benjamin et Léo un peu bizarres à cause de leurs intérêts et leur personnalité. Je vois qu’ils sont authentiquement eux. Ils ont toujours su qui ils étaient et ce qui les intéressait. Au contraire de moi et de beaucoup de gens qui avons senti très jeune le besoin de changer qui on est pour se conformer à ce qu’on attendait de nous. Je ne sais pas si un jour je serai moi à 100% parce que le chemin est long pour me retrouver après toutes ces années déconnecté de qui je suis vraiment.

Est-ce que tu sens que tu es passé à côté de quelque chose en n'allant pas au secondaire?

Benjamin

Benjamin exprime qu’il se sent repoussé par des gens qui ont une attitude de groupe et de pression. Je crois que sans mettre le doigt dessus, ce qui le repousse est ce besoin, que moi-même j’avais de me conformer à ce qu’on attendait de moi. Ça fait en sorte que j’étais en mode « Je me mets de la pression et je fais des efforts pour atteindre les objectifs qu’on a choisis pour moi. » Ça fait aussi des gens qui sont en mode performance et compétition plutôt que collaboration. Je crois que de côtoyer des gens en mode performance fait en sorte que Benjamin ressent cette pression qu’il n’avait pas beaucoup vécue avant et qu’il n’apprécie pas le stress supplémentaire que ça lui fait vivre. Il préfère une vie plus équilibrée avec le stress qui vient avec les objectifs qu’il a choisi.

Ça ne veut pas dire qu’il ne réussit pas. Parce que c’est la croyance populaire: si je ne me mets pas de pression et que je ne fais pas d’efforts, je ne vais pas réussir. Personnellement quand je sens que je me mets de la pression, c’est mon signal. Ça m’indique que je n’apprécie pas vraiment ce que je fais.

J’ai écrit sur ce sujet=> Ne pas montrer aux enfants à faire des efforts.

Léo

Parce qu’il a choisi d’aller à l’école, il s’engage totalement même si c’est quelque chose qu’il n’aime pas particulièrement, l’école. Comme Benjamin, Léo a des objectifs.

« Qu’est-ce qu’il faut c’est s’engager »
— Léo

Il décrit tellement bien en quelques mots mon parcours. Arrivé à la fin du secondaire j’en pouvais plus. J’ai fini mon secondaire parce que je sentais que je n’avais pas le choix, mais tous les jours je souffrais sans m’en rendre compte. J’étais tellement habitué à vivre un quotidien qui ne m’inspirait pas, c’était mon normal parce que c’était ce que j’avais connu presque toute ma vie. J’étais habitué un quotidien médiocre. Habitué à ne pas être heureuse et à ne pas être stimulé par des projets qui m’intéressent et qui me passionnent. J’étais éteinte, comme morte à l’intérieur de moi.

Depuis que je suis maman, je suis sur le chemin de redécouvrir qui je suis et me construire un quotidien qui me passionne. Lentement et surement je retrouve le goût de me lever le matin parce que j’ai hâte d’aller jouer. Comme quand j’étais une petite fille.

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À bientôt et bon mois de la sensibilisation aux apprentissages en famille! #msaef

Julie xo